On entend souvent dans les « cercles de photographes » que le photographe de mariage est un photographe qui a raté sa carrière faute de pouvoir se développer dans l’Art (discipline absolue de la photographie), ou la mode, la pub, la guerre, bref ces domaines qui font le prestige de l’uniforme photographique. Le photographe de mariage généralement n’a pas d’assistants, ni d’équipe de stylistes, déco, coiffeur, maquilleuse, ou assistant « Plus-fort-la-musique » et un autre « Le-ventilo-dans-les-cheveux ». C’est une sorte de sherpa qui porte seul ses 20Kg de matériel sur le dos, habillé de telle sorte qu’il s’intégrera parfaitement à votre mariage (classe-mais-pas-trop) sans suer (non, on n’apprend pas ça à l’école des photographes, ça c’est sur le terrain) et qui court partout sans qu’on le voit (un peu comme un ninja) pour capturer les Instants précieux de votre Jour Heureux.

Ce préambule passé, il ne faut surtout jamais oublier que le photographe de mariage est avant toutes choses un photographe qui excelle dans 2 domaines très pointus de cet art populaire : le portrait et le reportage. Ces compétences techniques nécessaires au bon photographe de mariage ne pourraient être valides si le bonhomme équipé de ses appareils et ses objectifs n’avait pas en plus certaines qualités humaines. J’entends par là qu’il doit avoir un excellent relationnel et comprendre les émotions du moment (mêmes les plus implicites) pour les saisir sans interférer. Effectivement, le Jour J est un jour très fort en émotions et le photographe doit pouvoir sentir et traduire en images ce qui est vécu par les mariés, les proches, les convives, afin de faire perdurer ces sentiments à travers le souvenir que procurera l’image regardée. Mais pour pouvoir capturer justement ces émotions, il faut que le photographe soit accepté des mariés. Il reste donc de prendre le temps de se rencontrer (plusieurs fois si nécessaire) pour d’abord décider du style photographique qui fera l’écriture de votre mariage et ensuite de convenir ensemble du déroulé de votre Journée (et tout plein de détails administratifs et comptables, qui n’ont aucun intérêt dans ce billet). La séance d’engagement est également une introduction utile et agréable pour faire connaissance avec le photographe et se familiariser au fait de se faire photographier. Cette séance se détermine avec les mariés lors du premier RDV quelques semaines avant la date du mariage. Et c’est quand même bien plus agréable pour les mariés et pour le photographe lorsque le Jour J il y a cette entente (voire complicité) déjà installée.

Il faut aussi, selon moi, que le photographe de mariage soit toujours d’excellente humeur. Impossible de ternir ce Jour fabuleux à cause d’un tracas personnel ou autres broutilles. Le photographe de mariage doit pouvoir en un instant gérer ses propres émotions pour être ouvert à celles des mariés et de leurs proches. Il doit être capable de tout voir tout en étant partout à la fois et de s’adapter à toutes les situations et leurs changements.

J’ai la chance d’avoir été éduqué dans un monde visuel, où le mode de communication est gestuel et où les expressions du visage sont vecteurs de sens. Une posture, une attitude, un regard, une expression du visage tout est élément de communication et de messages. Je me sers de cette expérience de vie dans mes reportages et les portraits que je réalise. On dit souvent que les Sourds ont une analyse extrêmement fine des expressions du visage, et plus généralement de la communication non verbale. En tant qu’enfant entendant de parents Sourds, j’ai souvent réussi à saisir l’Instant décisif, le regard, l’attitude, le geste, l’émotion.

Photographe autodidacte, j’ai appris à cadrer en photographie comme je regardais le monde à travers ma culture « Sourdentendant », en plaçant les éléments constitutifs de l’histoire que je souhaitais créer dans mon image. Et puis, j’ai appris et compris les règles de la photographie pour finir par les acquérir, sans jamais oublier ma propre vision. Je considère ce parcours biculturel (et bilingue) comme étant un atout que beaucoup d’autres n’ont pas. Je me dois d’utiliser cela afin de rendre à mes clients un service à la hauteur de leurs attentes. J’aime faire des portraits, réellement. J’ai l’impression qu’en photographiant les émotions sur leur visage, je finis par les connaître, un peu.

Je ne sais pas quel est le ressenti des mariés vis-à-vis de leur photographe à l’issue de cette journée, une fois que tout est photographié, que les images sont traitées puis livrées. Ce que je ressens c’est de la nostalgie. Je sais que ce sont des clients que je ne reverrai peut être pas. Et je veux les remercier de m’avoir fait confiance, de m’avoir confié cette lourde responsabilité d’immortaliser les moments de cette Journée, de m’avoir permis de partager avec eux, ces émotions, de m’avoir autorisé à capturer ces expressions de visage, ces sourires, ces rires, larmes de joie, embrassades, bouches qui mangent et boivent, verres qui trinquent, des enfants qui jouent, des regards d’amoureux, d’aïeux, de fierté, de bonheur. Pour tout cela, à chaque fois, j’ai envie de dire MERCI ! Merci de me permettre de saisir tous ces Instants.

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